Alain- Emile-Auguste Chartier Philosophe et journaliste français1868 – 1951
Le plus difficile au monde est de dire en y pensant ce que tout le monde dit sans y penser.
Le plus grand plaisir humain est sans doute dans un travail difficile et libre fait en coopération, comme les jeux le font assez voir.
Le plus vulgaire des hommes est un grand artiste dès qu'il mime ses malheurs.
Le poème est un miracle, le seul miracle humain. La poésie, c'est le son qui donne le sens; c'est le son avant le sens.
Le principe du vrai courage, c'est le doute. L'idée de secouer une pensée à laquelle on se fiait est une idée brave. Tout inventeur a mis en doute ce dont personne ne doutait. C'était l'impiété essentielle.
Le Prolétariat tient pour l'Humanité contre les Pouvoirs.
Le propre de la poésie est que les mots éclairent selon leur place.
Le sage est sage, non par moins de folie, mais par plus de sagesse.
Le signe «oui» est d'un homme qui s'endort; au contraire, le réveil secoue la tête et dit non.
Le sourire est la perfection du rire.
Le souvenir commence avec la cicatrice.
Le spectacle des montagnes donne quelque idée du fait accompli.
Le style est la poésie dans la prose, je veux dire une manière d'exprimer que la pensée n'explique pas.
Le subalterne est courtisan; le subalterne ne dit jamais ce qui est, mais seulement ce qui plait; cette règle est suivie ingénument.
Le symbole est au sentiment ce que l'allégorie est à la pensée.
Le travail a des exigences étonnantes, et que l'on ne comprend jamais assez. Il ne souffre point que l'esprit considère des fins lointaines; il veut toute l'attention. Le faucheur ne regarde pas au bout du champ.
Le travail de réflexion amaigrit les idées.
Le tyran n'aime pas qu'on raisonne; et c'est qu'il craint en lui-même un raisonneur, qui se tournerait contre lui.
Le vrai désespoir est sans réflexion.
Le vrai poète est celui qui trouve l'idée en forgeant le vers. Il faut que la rime soit raison.
Le vrai savoir ne revient jamais à quelque petite chose tout près des yeux; car savoir c'est comprendre comment la moindre chose est liée au tout.
Les confidences ... sont toujours de fausses confidences.
Les femmes, j'entends celles qui sont occupées à chiffonner et à pouponner, ne comprendront sans doute jamais bien pourquoi les hommes vont au café et jouent aux cartes.
Les grandes pensées ont quelque chose d'enfantin, qui fait que les beaux esprits passeront toujours à côté sans les voir.
Les grands hommes sont plus grands que nature dans le souvenir. Ce que nous voyons en eux, c'est à la fois le meilleur d'eux et le meilleur de nous.
Les grands succès rendent modeste, s'ils ne rendent sot.
Les hypocrites ne sont pas des menteurs délibérés ... . C'est qu'ils croient que penser n'est que penser.
Les maximes générales sont surtout bonnes contre les peines et les erreurs du voisin. Mais contre une fureur d'amour trompé ou d'ambition, ou d'envie, que pourrait une maxime? Autant vaudrait, contre la fièvre, lire l'ordonnance du médecin.
Les métiers sans ennuis sont les métiers qu'on ne fait pas.
Les morts ne sont pas morts, c'est assez clair puisque nous vivons.
Les nations étant inévitablement plus bêtes que les individus, toute pensée a le devoir de se sentir en révolte.
Les nigauds de moralistes disent qu'aimer c'est s'oublier; vue trop simple; plus on sort de soi-même et plus on est soi-même; mieux aussi on se sent vivre.
Les passions sont ainsi faites, peut-être, qu'elles périssent dès qu'elles n'ont plus à attendre.
Les proverbes ne sont point d'entendement, mais de raison. Ils ne concernent jamais la nature des choses, mais ils visent à régler la nature humaine, et vont toujours à contre-pente, contre les glissements qui nous sont naturels.
Les quatre vices principaux correspondent aux quatre vertus. Ce sont la lâcheté, l'intempérance, l'injustice et la sottise.
Les sentiments altruistes, toujours naturels, et source de plaisirs pour tous quand ils sont satisfaits, sont aussi naturellement faibles.
Les temps sont courts à celui qui pense, et interminables à celui qui désire.
Les vices ne sont que des vertus à mi-chemin.
Les vrais problèmes sont d'abord amers à goûter; le plaisir viendra à ceux qui auront vaincu l'amertume.
Lorsque l'énoncé d'un problème est exactement connu, le problème est résolu; ou bien c'est qu'il est impossible. La solution n'est donc autre chose que le problème bien éclairé.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire