Alain- Emile-Auguste Chartier Philosophe et journaliste français1868 – 1951
La vertu d'un homme ressemble bien plus à ses propres vices qu'à la vertu du voisin.
La vie est un travail qu'il faut faire debout.
La vie privée est toujours triste, si chacun attend le bonheur comme quelque chose qui lui est dû.
La vraie difficulté est de savoir ce qu'on veut prouver.
La vraie méthode pour former la notion de philosophie, c'est de penser qu'il y eut des philosophes.
Le beau nous somme de penser.
Le besoin d'écrire est une curiosité de savoir ce qu'on trouvera.
Le bonheur dépend des petites choses, quoiqu'il dépende aussi des grandes.
Le bonheur est une récompense qui vient à ceux qui ne l'ont pas cherchée.
Le bonheur n'est pas le fruit de la paix, le bonheur, c'est la paix même.
Le bonheur suppose sans doute toujours quelque inquiétude, quelque passion, une pointe de douleur qui nous éveille à nous-même.
Le comique défait les passions et même les sentiments; la frivolité les guette à leur naissance et les dissout dans son tourbillon.
Le conteur, qui veut faire paraître des choses absentes, y réussit bien mieux par le frisson de la peur que par une suite raisonnable de causes et d'effets.
Le corps humain est le tombeau des dieux.
Le courage nourrit les guerres, mais c'est la peur qui les fait naître.
Le défaut de ce qui est intéressant par soi, c'est qu'on n'a pas de peine à s'y intéresser, c'est qu'on n'apprend pas à s'y intéresser par volonté.
Le doute est le sel de l'esprit, sans la pointe de doute, toutes les connaissances sont bientôt pourries.
Le doute est le signe de la certitude.
Le doute n'est pas au-dessous du savoir, mais au-dessus.
Le duelliste habile n'a point peur parce qu'il voit clairement ce qu'il fait et ce que fait l'autre; mais s'il se livre au destin, le regard noir qui le guette le perce avant l'épée; et cette peur est pire que le mal.
Le fanatisme n'est sans doute pas autre chose que le sentiment d'une fatalité effrayante qui se réalise par l'homme.
Le génie n'est sans doute qu'un long refus.
Le langage absolu se retrouve en tous les arts, qui, en ce sens, sont comme des énigmes, signifiant impérieusement et beaucoup sans qu'on puisse dire quoi.
Le langage est un être sociologique; il est même le lien des sociétés véritables, qui ne tiennent que par les monuments du passé.
Le maître écoute et surveille bien plus qu'il ne parle. Ce sont les grands livres qui parlent, et quoi de mieux?
Le maître ne nous apprend rien d'autre que ceci, qu'il faut que chacun soit son propre maître, ce qui fait tous les hommes égaux.
Le mariage, depuis le moment où il est conclu et scellé, est une chose à faire, non une chose faite.
Le mépris des richesses et des honneurs est facile en somme; ce qui est proprement difficile, c'est, une fois qu'on les méprise bien, de ne pas trop s'ennuyer.
Le métier de surveiller rend stupide et ignorant; cela est sans exception.
Le mot de passion nous avertit fortement ici, car il désigne un esclavage et un malheur.
Le nez en bec d'aigle, et bien coupant, exprime toujours quelque dureté impérieuse ...
Le paradoxe humain c'est que tout est dit et que rien n'est compris.
Le peintre est donc tenu par l'apparence; et c'est son affaire d'enfermer tout le vrai qu'il pourra dans une seule apparence.
Le père Grandet, comme on voit dans Balzac, bégayait exprès quand il traitait une affaire; c'est un bon moyen de cacher sa propre pensée et de faire sortir celle de l'autre, par la furieuse envie qu'il a bientôt de finir les phrases du bègue.
Le pessimisme est d'humeur; l'optimisme est de volonté. Tout homme qui se laisse aller est triste...
Le petit mot «Je ferai» a perdu des empires. Le futur n'a de sens qu'à la pointe de l'outil. Prendre une résolution n'est rien; c'est l'outil qu'il faut prendre.
Le philosophe est le marchand de sommeil des mots.
Le plus bel amour ne va pas loin si on le regarde courir. Mais plutôt il faut le porter à bras comme un enfant chéri.
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